Le 20 mars de cette année, le Haut Conseil Aux Droits de l’homme des Nations Unies (UNHRC) s’est réuni une fois de plus autour de l’agenda numéro 7, un objet de cession obligatoire depuis juin 2006, dont le seul but est de condamner systématiquement la démocratie israélienne pour des crimes dont l’existence reste à prouver.
Cet agenda, officiellement destiné à évaluer la situation humanitaire dans les territoires palestiniens, à l’aune des seuls rapports remis par le Fatah, l’OLP et diverses ONG acquises à leur cause, s’inscrit dans le cadre d’une campagne plus large, menée tambour battant par des pays champions des droits de l’homme, comme la Lybie, l’Algérie, le Koweït, l’Arabie Saoudite, l’Irak, ou encore le Soudan et le Yémen. Israël est ainsi le seul pays de la planète à bénéficier du douteux privilège d’être scruté dans la moindre de ses actions, par un agenda particulier, ratifié essentiellement par ses ennemis.
S’il ne s’agissait que d’exprimer cette obsession, née d’une vieille habitude pour les dictatures arabo-musulmanes de faire de l’État Hébreu leur bouc émissaire, responsable de tous les malheurs infligeant leurs sociétés, l’agenda numéro 7 se réduirait à une simple curiosité, d’autant que la cession est régulièrement boycottée par une majorité de pays occidentaux, et systématiquement par les États Unis.
Malheureusement, cette israélophobie, pendant d’une islamophobie imaginaire, et bien réelle quant à elle dans les quartiers généraux de l’ONU, est une tâche qui n’a cessé de se répandre depuis que les Nations Unies, du bout des lèvres, ont partitionné en 1947, les 20% restant d’une Palestine Mandataire, cœur de deux nationalismes concurrents.
Que l’on en juge plutôt: en 1948, alors qu’Israël venait de repousser l’agression à but génocidaire de 5 pays voisins, après avoir été officiellement reconnu comme état souverain par la quasi-totalité des démocraties occidentales et tandis que des centaines de milliers de Juifs, fuyaient l’oppression des dictatures arabes, quand ils n’en étaient pas chassés manu militari, l’ONU donnait naissance à l’UNRWA, une organisation destinée à venir en aide aux seuls réfugiés Palestiniens.
Le mandat de l’UNRWA était d’un an. Soixante-dix ans plus tard, l’avatar onusien continue de fonctionner à l’intérieur des territoires palestiniens et des pays avoisinant, avec un budget annuel proche du milliard de dollars, dont une partie couvre les salaires et les fonds de retraite de 25000 à 27000 employés, ( parmi lesquels de nombreux membres du Hamas ), des écoles dans lesquels les descendants de descendants de «réfugiés», installés dans des banlieues ou des villages portant le nom de «camps», apprennent que Tel Aviv et Haïfa leur a appartenu et devrait donc leur revenir, et où le mythe d’un droit au retour impossible continue de faire rêver des générations gardées en otage et incitées à la haine d’Israël et des Juifs.
Ainsi que l’indiquait Saïd Aburish, biographe d’Arafat et ancien conseiller de Saddam Hussein à l’auteur de cet article: «Afin de conserver les rations de l’UNRWA, les Palestiniens avaient pris l’habitude d’enterrer leurs morts la nuit, de sorte que jamais personne ne mourait dans les camps, sauf lorsqu’il était possible d’en accuser Israël. De ce fait, les chiffres des réfugiés ont toujours été faussés, ce qui arrange évidemment l’UNRWA, puisque leur budget annuel dépend du nombre d’âmes dont elle a la charge».
Il n’est de secret pour personne qu’en moins de 70 ans l’ONU a condamné plus souvent Israël que la totalité des pays de la planète, y compris ceux coupables de génocides, à tel point que cet état de fait est à l’origine du plus grand nombre de vétos Américains, tous gouvernements confondus.
Il n’est pas inutile de rappeler qu’entre 1981 et 1986, alors qu’Israël avait mis en place un programme social destiné à réhabiliter les réfugiés arabes établis à Gaza, la seule réaction de l’ONU, sous la pression du Fatah de Yasser Arafat, fut de condamner l’État Hébreu pour son initiative, en concluant chacune de ses résolutions par cet ordre affligeant «Renvoyez les réfugiés dans les camps».
Il n’est pas non plus inutile de remonter à 1976, pour se souvenir de l’infamante résolution «Sionisme égale racisme» sous la responsabilité de l’ancien nazi Kurt Waldheim, alors secrétaire général, une semaine après que Idi Amin Dada a reçu un accueil triomphal au siège de l’ONU.
Il suffit, en revanche, de se reporter à l’Assemblée Générale du 21 décembre 2016 pour constater qu’Israël, une fois de plus, était condamné 20 fois tandis que l’ensemble des événements tragiques de la planète, des massacres en Syrie, aux menaces Nord Coréennes, en passant par la crise de Crimée, et par la maltraitance des femmes et des minorités aussi bien en Iran qu’en Arabie Saoudite, étaient sanctionnés, presque à contrecœur, par une toute petite demi-douzaine de résolutions.
La liste des injustices faites à l’État Juif par une organisation censée préserver la paix dans le monde et que De Gaulle appelait avec mépris «le machin», et par ses émanations, est si longue qu’il faudrait plusieurs volumes d’une encyclopédie réservée à ce thème pour les exposer.
De toutes, cependant, aucune n’a fait autant de bruit ni provoqué un tel rejet sur la scène internationale que celle édictée par l’UNESCO le 26 octobre 2016.
Soumis par l’Algérie, l’Égypte, le Liban, le Maroc, Oman, le Qatar et le Soudan, ce texte, ratifié par la majorité arabe automatique, et bénéficiant de l’abstention de la quasi-totalité des pays européens, y compris la France, offrait une réécriture aussi nouvelle qu’étonnante de l’histoire en niant toute connexion entre le Judaïsme et le Mont du Temple, y compris le mur des lamentations, soulignés dans chaque paragraphe par leurs seuls noms arabes, le Haram Al Sharif et le mur Al Buraq. Le degré d’absurdité de cette résolution a d’ailleurs conduit le nouveau secrétaire général de l’UNESCO, Antonio Guterres à la contredire, par une déclaration dont l’autorité Palestinienne a exigé le retrait, en même temps que des excuses.
Même s’il peut paraître outrancier de systématiser de façon ciblée les condamnations contre l’État hébreu, cela reste dans un cadre politiquement compréhensible si l’on tient compte de la composition des Nations Unies et des challenges provoqués par le marteau terroriste et l’enclume pétrolière. En revanche, pourquoi l’UNESCO, dont la fonction affirmée est justement la préservation de l’histoire et la préservation de la paix, devait-elle participer à une pantalonnade dont la conclusion, stricto sensu, serait que Jésus chassa les marchands de l’esplanade des mosquées, six siècles avant la naissance de l’Islam?
Tout d’abord, le contexte religieux. Jérusalem et plus particulièrement la vieille ville et le Mont du Temple, sont des lieux sacrés pour les trois monothéismes. En revanche, de l’avis même du Docteur Yussuf Natshe, responsable du Waqf, en charge des lieux saints musulmans de Jérusalem, et du Sheikh Omar Awadallah Kiswani, directeur de la mosquée Al Aqsa, ces lieux ne sont pas à partager, car «ils appartiennent à l’Islam de toute éternité, ainsi que Dieu et l’Unesco l’ont voulu» ( propos recueillis par l’auteur ). Le but des Palestiniens, soutenus par le monde musulman, serait de donner le nom de la mosquée Al Aqsa à tout le Haram Al Sharif ( le Mont du Temple ) de sorte que l’accès en devienne définitivement interdit à tout non-musulman, comme le sont La Mecque et Médine.
Dans ce cas, pourquoi la France s’est-elle rendue complice, par abstention, d’une telle aberration?
Celle-ci s’est inscrite dans un programme plus vaste, établi alors que tous les sondages donnaient Hilary Clinton victorieuse à la succession de Barak Hussein Obama. Le président américain d’alors avait défini une position relative au problème moyen oriental décalée par rapport à celle de ses prédécesseurs, qui devait changer la donne, par recalibrage positif en faveur des frères musulmans et de l’Iran. Au cœur du credo Obamien, les fameuses «colonies» israéliennes, censées symboliser le mal absolu, sans lesquelles la paix mondiale n’était qu’à une plume de colombe, tandis que le terrorisme international, y compris palestinien, ne pouvait en aucun cas émaner des excès d’une religion qualifiée de paix et d’amour.
Cette position, plus partisane qu’objective, et surtout en rupture avec la tradition américaine, était également considérée par nombre d’observateurs comme une façon de désengager progressivement les États Unis d’un processus de paix moribond, après l’échec, en 2014, des négociations engagées sous la houlette de John Kerry.
Le gouvernement de François Hollande avait alors sans doute pensé que l’opportunité était grande de remettre la France en première ligne de la diplomatie internationale, en plongeant dague à la main dans l’effroyable nœud gordien du conflit Israélo-Arabe. D’où le projet d’une conférence internationale dont le siège serait à Paris (mais dont les principaux concernés, Israël et les Palestiniens, seraient exclus). Politique arabe oblige – telle qu’instaurée par De Gaulle en 67, et suivie par les gouvernements français successifs – il n’était pas question de laisser la part belle à l’État Juif et bien qu’officiellement alliée d’Israël, ne serait-ce que sur le plan sécuritaire, la France se devait d’appuyer sa conférence par un appel du pied aux pays dont dépend sa fourniture énergétique.
Seulement, nul ne se doutait de la victoire de Donald Trump, et que celle-ci allait entraîner un repositionnement américain en faveur d’Israël, avec, sans doute prochainement, le déplacement de son ambassade de Tel Aviv à Jérusalem, capitale officielle de l’État Hébreu, et des coups de semonce répétés contre la partialité systématique de l’ONU ( l’on se souviendra de la mise en garde de Nikky Haley, nouvellement nommée ambassadrice aux Nations Unies, le 27 janvier, contre l’infâme agenda 7 ).
Il s’agit donc, désormais, d’un authentique rééquilibrage de la position américaine et, par ricochet, de celles prises par l’Europe et la France, dans un conflit qui souffre depuis trop longtemps du deux poids deux mesures en faveur de l’Autorité Palestinienne, rendant de fait impossible toute avancée dans les négociations de paix.
Pourquoi, en effet, les Palestiniens feraient-ils la moindre concession, puisqu’il leur suffisait, jusqu’alors, d’exiger de la communauté internationale pour obtenir?
Obtenir quoi? L’indépendance d’un pays autonome, telle qu’exprimée par leurs déclarations officielles? S’il ne s’agissait que ce cela, Israël aurait depuis longtemps signé en bas de la page. Mais cette conclusion heureuse serait aller dans le sens d’une volontaire populaire palestinienne aux antipodes de celle de ses dirigeants. De l’avis de Bassem Eid, analyste politique et activiste des droits de l’homme palestinien, «L’autorité palestinienne est comme un parti d’opposition. Il lui suffit de critiquer et d’accuser Israël, elle n’a rien d’autre à faire ni à prouver, pour recevoir tout l’appui et tout l’argent dont elle a besoin. Et pendant que la France et l’Europe offrent des médailles à Mahmud Abbas, le peuple palestinien continue à souffrir sous sa dictature.»
Il serait donc temps que la France, et l’Union Européenne, reconnaissent qu’à une table de poker on ne donne pas tous les as au même joueur. Même si celui-ci brandit diverses menaces, y compris celle du recours au terrorisme, avec l’approbation d’une organisation qu’il a depuis longtemps phagocytée.
Publié avec l’autorisation du Figaro