Chaque attentat terroriste est un choc, auquel succède, malheureusement, un concert d’atermoiements, d’analyses à l’emporte-pièce et de tentatives d’en diminuer l’impact.
Comme s’il suffisait de tendre des fleurs aux assassins de l’innocence pour les freiner dans leur projet abject de domination par la terreur.
À ce jour, malgré plusieurs tentatives de projet commun, aucune organisation internationale n’a encore donné de définition définitive au terrorisme. En revanche, à l’université de contre-terrorisme d’Hertzlyia – dont j’ai eu le privilège de suivre le cursus – le Docteur Boaz Gannor avait l’habitude de marteler: «Le terrorisme, c’est le terrorisme, c’est le terrorisme!» Avant d’y aller de sa définition. «Le terrorisme est un ensemble d’actes de violence visant une population civile de façon systématique et indiscriminée dans le but d’obtenir un gain politique».
C’est une définition que j’ai également adoptée, tout en regrettant que les gouvernements et les médias n’en fassent pas une utilisation plus large qui leur permettrait de cadrer une bonne fois pour toutes l’acte terroriste sans être tenté de déraper vers le politique.
La raison de cette hésitation? Le politiquement correct.
Car, si cette définition colle à l’acte de façon si précise, c’est parce qu’elle inclut une intention. La volonté de tuer des civils. De ce fait, les partisans du politiquement correct, qui sont pour la plupart également des adeptes du relativisme moral, se verraient retirer leur principal outil d’aplanissement des événements par association des actes.
Après tout, qu’est-ce qu’un attentat ayant causé la mort d’une demi-douzaine de civils, quand les bombardements de l’occident entraînent des centaines, voire des milliers de dommages collatéraux?
Il s’agit là, évidemment, d’un débat moral, qui a parfois des airs de syllogisme. Car, si l’intention fait l’action, ainsi qu’il nous est appris en cours de philosophie de terminale, elle ne lui est pas égale. C’est la raison pour laquelle, dans le domaine de la criminalité, les psychiatres légistes américains utilisent «l’échelle de dépravation» développée par le Docteur Michael Welner, expert en psychopathologie auprès du FBI, pour définir la gravité d’un acte en fonction de son intention.
Il est issu du simple bon sens de reconnaître la différence entre un accident de la route, entraînant le mort de plusieurs personnes, même si le responsable est un chauffard alcoolique, et l’utilisation désormais entrée dans les mœurs d’une voiture-bélier pour massacrer le plus grand nombre possible de passants. Pourtant, nombre de politiques, sans compter nos grands médias, les mettraient au même niveau, lorsqu’ils estiment qu’à partir du résultat – la mort d’innocents – les actions se valent.
Par exemple, durant l’opération de l’armée israélienne à Gaza, les représailles de l’État hébreu ont non seulement été mises au même niveau que les actions terroristes du Hamas et de la Djihad Islamique, mais du fait qu’Israël était le plus fort, et causait un plus grand nombre de morts dans le camp adverse, c’est vers son armée que s’est tournée l’opprobre de la plupart des commentateurs «bien-pensants».
Oubliées, les quelque cinq mille rockets lancées dans le but de faire le plus de dommages possibles à la population civile par les organisations terroristes qui dirigent Gaza. Oubliée l’utilisation de boucliers humains par le Hamas, tandis qu’Israël tentait tout ce qui était en son pouvoir pour protéger les habitants de la bande. Les seuls éléments retenus, sont les chiffres. Combien de morts d’un côté, et combien de l’autre?
À l’aune du politiquement correct, l’Allemagne nazie et le Japon impérialiste s’en seraient sans doute sortis avec un satisfecit étant donné l’efficacité des bombardements alliés.
D’où, peut-être, cet échange entre le général Mac Arthur et le président Truman en septembre 1945.
Mac Arthur: «Demain, nous signons le traité de reddition de ces salopards jaunes. Aucune instruction spéciale?
Truman:: Bravo pour un super boulot. Mais faites attention à la façon dont vous vous exprimez auprès de la presse, parce que certaines de vos remarques ne sont pas politiquement correctes.
Mac Arthur: Je suis confus. Que veut dire exactement politiquement correct?
Truman: Le politiquement correct est une doctrine, récemment encouragée par une minorité délirante et illogique et promue par des médias traditionnellement malades, qui voudrait démontrer qu’il est tout à fait possible de ramasser de la m… sans se salir les mains!»
C’est au nom de cette doctrine qu’il est, en France, convenu d’appeler «jeunes» les casseurs de banlieue pour la plupart issus de l’immigration. Pour une certaine presse, les terroristes sont «des activistes», des «combattants», au mieux des «extrémistes» et parfois même des «détraqués mentaux». C’est également pour rester politiquement correct qu’Arte a refusé récemment de diffuser un documentaire sur l’antisémitisme, pourtant commandé par la chaîne, dans lequel la lumière était trop mise sur la haine antijuive qui progresse dans la sphère arabo-musulmane et dans une extrême gauche obsédée par le sionisme. Car, la grande peur du monde occidental, qui fait face aujourd’hui à une menace existentielle dont il refuse de reconnaître la réalité malgré le nombre de menaces et d’attaques, c’est d’avoir à se lancer dans un combat remettant en question ses fondements philosophiques les plus importants.
Alors, on tergiverse, on change le vocabulaire, et, pour copier l’ancien président Obama, on veut oublier que si tous les musulmans, loin de là, ne sont pas des terroristes et qu’ils sont, il faut le reconnaître, les premières victimes de l’islamisme, la quasi-totalité des terroristes sont issus de cette religion.
Ceux de Paris, en tout cas. Et ceux de Londres, de Madrid, de New York, de Boston. La liste est longue si elle doit inclure les attentats islamistes au cœur même de l’Islam. Et si l’on ajoute Israël, première victime de cette mouvance depuis bien avant sa naissance, il ne s’agit plus d’un catalogue, mais presque d’une encyclopédie.
Le reconnaître ne fait de personne un islamophobe, à moins de remonter à l’étymologie du terme, phobie exprimant une crainte plutôt qu’une haine. Ce qui ne semble pas être compris par le porte-parole du nouveau gouvernement français, Christophe Castaner, lorsqu’il affirme: «Cessons de parler d’État Islamique, ils trahissent la religion qu’ils prétendent servir. Ce sont juste des assassins»” provoquant une réponse cinglante de Pascal Bruckner dans ces mêmes pages: «On assiste, en France, à une impressionnante multiplication de théologiens et de spécialistes en islam. Nos politiques sont tellement informés qu’ils savent mieux que les musulmans ce qu’est l’Islam lui-même!»
Ayant couvert la guerre d’Irak en me faisant intégrer dans l’armée américaine en janvier et février 2008, j’ai eu l’opportunité de comprendre un fait majeur sur le terrain. Les musulmans sont majoritairement contre la violence et contre le terrorisme, mais s’ils ne manifestent pas ouvertement leur désaccord, c’est parce qu’ils ont le sentiment que la force est du côté des criminels et des dictateurs, et non de celui des démocraties. Ils ont peur. Et le politiquement correct, qui voudrait les protéger de nos opinions, est loin de les protéger de la seule menace qu’ils craignent. Le terrorisme du voisin de palier.
Il ne fallait pas aller en Irak, c’est certain. Mais, une fois que les Américains y étaient, il fallait y rester.
Sur place qu’il s’agisse de la zone verte ou de Durah, où était basée mon unité de cavalerie, j’ai pu assister à un changement progressif d’attitude à l’égard de l’occupant. Des gamins qui, cinq ans plus tôt, avaient pour modèles des personnages mythiques de la Jihad, et rêvaient d’attentats suicides qui feraient d’eux des héros post-mortem se prenaient désormais à envier le mode de vie des envahisseurs, tandis que leurs parents, anciens sympathisants d’Al Qaida ou de Saddam Hussein, étaient désormais enclins à dénoncer leurs voisins s’ils les soupçonnaient d’appartenir à une organisation terroriste.
La qualité du renseignement s’en est grandement améliorée. La cause? Pour un temps, ils se sont sentis protégés par l’armée de l’oncle Sam. Les Américains, dans leur esprit, étaient devenus les plus forts.
Ils parlaient vrai!
Heureusement, semble-t-il, avec l’arrivée de Trump au pouvoir, le politiquement correct, qui nous conduit à peser chaque mot dès qu’il est question de terrorisme islamiste, a vécu ses beaux jours. Si son prédécesseur n’a jamais associé les deux termes dans aucun de ses discours, Trump ne s’est pas privé pour le faire devant les dirigeants du monde arabe, ainsi que je l’écrivais dans une précédente tribune.
Le résultat n’a pas tardé à se faire sentir, puisque, une semaine plus tard, le Qatar, un des pays les plus impliqués dans le terrorisme, par son soutien au Hamas, et son attitude ambiguë envers l’Iran, sans compter la diffusion systématique de programmes anti occidentaux et l’obsession anti-israélienne de sa chaîne de télévision, Al Jazeera, était forcé de rompre ses relations diplomatiques avec les autres pays du Golfe et l’Arabie saoudite.
Il va sans dire que les pays concernés, Arabie Saoudite en premier, n’ont jamais été blanc-bleus sur la question du terrorisme, et l’on connaît en partie leur implication dans les attentats du 11 septembre. Mais le Moyen Orient se divise désormais entre deux axes. Celui du chaos, avec l’Iran, la Syrie et le Qatar, comme principaux intervenants. Et celui de la stabilité, qui pourrait conduire les pires abuseurs des droits humains à une évolution progressive vers plus de démocratie et plus d’égalité. Trump ne s’y est pas trompé en reconstruisant les vieilles alliances.
Il aura donc suffi à un leader politique d’appeler un chat, un chat, et de démontrer que le monde libre n’était pas à bout de souffle. Au contraire.
Il suffirait à ce monde qui prône des valeurs incontournables d’égalité et de liberté, d’abandonner le politiquement correct pour retrouver sa force et son compas moral.
Je laisse la conclusion au Docteur Michael Welner, dans un des documentaires sur la psychopathologie terroriste que j’ai eu l’honneur de réaliser: «Le terrorisme islamique cessera d’être une menace grandissante, le jour où les médias et les gouvernements, au lieu de diminuer son impact par crainte des mouvements populaires, le condamneront comme émanant d’une religion qui n’a pas encore connu ses lumières et dont il est, par la force des choses, une perversion»